Épisode 7/Août 2021
Valérie Paquin : L’accession à la propriété au Canada : une perspective plus large
Les avantages personnels, économiques et sociaux de l’accession à la propriété au Canada sont nombreux et importants. Cependant, les problèmes d’offre et d’abordabilité font en sorte qu’il est plus difficile pour les personnes qui souhaitent devenir propriétaires de réaliser cet objectif.
Dans le septième épisode d’EN DIRECT, nous discutons avec Valérie Paquin, administratrice de représentation générale à L’Association canadienne de l’immeuble (ACI) et co-propriétaire de Via Capitale Rive-Nord. Soyez des nôtres alors que nous nous intéressons aux avantages non financiers de l’accession à la propriété au Canada ainsi qu’aux mesures nécessaires pour faciliter l’accès à la propriété.
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Transcription de l'épisode
Claudia Marques : Bonjour et bienvenue à l’émission EN DIRECT, un balado qui vous propose des conversations intéressantes avec des personnes inspirantes sur des questions qui touchent l’immobilier canadien et leur impact sur les membres de l’ACI ainsi que tous les Canadiens. Je me présente, Claudia Marques et dans cet épisode, nous allons aborder un sujet qui touche l’ensemble de la population, celui de l’accession à la propriété au Canada.
Tout le monde mérite d’avoir un chez soi et pour plusieurs, devenir propriétaire est un objectif de vie. Cependant, dans le contexte de reprise économique post-pandémique que nous connaissons actuellement, c’est-à-dire un accès à la propriété difficile dû à la demande qui est beaucoup plus forte que l’offre, comment peut-on accroître l’accession à la propriété au Canada ? Quels sont les efforts gouvernementaux mis en place pour s’assurer que toute la population puisse vivre confortablement sous un toit ? Comment est-ce que le rôle du courtier immobilier a évolué pour mieux servir les clients à la recherche de résidences ? Et quels sont les avantages de l’accès à la propriété sur les plans personnel, économique et social ? Restez à l’écoute car notre invitée, Valérie Paquin, courtier immobilier résidentiel et commercial et dirigeante d’agence à Via Capitale prend le temps de bien nous expliquer l’impact et les avantages non financiers d’être propriétaire. Bonjour Valérie !
Valérie Paquin : Allô Claudia,
Claudia : Tout d’abord j’aimerais vous remercier de prendre le temps de nous parler aujourd’hui, on va aborder un sujet qui touche vraiment tout le monde : l’accès à la propriété. On le sait, tout le monde mérite d’avoir un chez soi mais pour plusieurs, devenir propriétaire, même si c’est un rêve, n’est pas nécessairement facile par les temps qui courent avec le marché qu’on connaît. On a vraiment une demande qui est beaucoup plus élevée que l’offre, les prix qui sont élevés dû à cela également. Donc ce n’est ni facile pour un premier acheteur qui désire entrer dans le marché, ni facile pour ceux qui désirent déménager parce que leurs besoins ont changé. Tout d’abord, si je suis acheteur et que je désire devenir propriétaire, quelles sont les étapes à prendre ou à suivre pour nous assurer que la transaction et l’expérience soient positives ?
Valérie : Première étape, il faut commencer par la banque ; on va voir notre conseiller financier ou on va voir un courtier hypothécaire pour établir combien on peut emprunter. Geler un taux hypothécaire : beaucoup de personnes ignorent que l’on peut faire ça, mais les banques vont protéger un taux pour certains mois, il y en a qui vont jusqu’à six mois selon les institutions financières donc on s’assure que si les taux augmentent on conserve notre taux qui est plus bas, et s’il baisse, ils vont le baisser quand même. Mais on garde une sécurité. Ça prouve un sérieux aussi au vendeur quand on est prêt à déposer une offre d’achat ; on a une preuve qu’on a fait nos devoirs.
C’est important de faire notre budget, justement pour savoir ; la banque peut nous prêter tel montant mais est-ce que c’est vraiment ça que je veux, comme paiement hypothécaire ? C’est tout l’exercice qu’il faut faire à deux, en couple ou seul selon… après on va dresser la liste des critères : qu’est-ce qu’on veut dans une propriété ? Est-ce que l’on veut un condo ? Est-ce que l’on veut une maison ? Est-ce que l’on veut une maison de ville ? Combien de chambres ? Est-ce que l’on veut un garage ? Qu’est-ce qui est absolument primordial ? Qu’est-ce que qui est un bonus si on l’a mais on peut faire un compromis ? Quel quartier ? Est-ce qu’on veut être plus proche du travail ? Est-ce qu’on veut être plus loin ? On ne veut pas de voisins ? On veut des voisins ? C’est toutes ces questions-là qu’il faut se poser de choisir un courtier immobilier qui va connaître le secteur, va nous faire poser des questions, va nous amener parfois à des endroits auxquels on n’avait pas pensé car il connaît son secteur, le milieu et sait quelles questions poser pour trouver la bonne maison. Ensuite, je dirais, il faut être patient, parce qu’on sait combien on peut s’offrir, ce que l’on veut, mais dans le manque d’inventaire en ce moment il faut être patient. Parfois cela peut prendre dix offres d’achat et il ne faut pas acheter à n’importe quel prix ou n’importe quoi. Il faut poser des questions, il ne faut pas fermer les yeux, il faut faire inspecter. Il faut prendre le temps parce qu’après on va vivre là pendant des années ; enfin c’est ce que l’on souhaite. On ne veut pas avoir à revendre dans deux ans parce que l’on va avoir acheté trop vite ou en oubliant de faire certaines vérifications. Donc, la patience, en ce moment je sais que ce n’est pas facile, on a hâte d’être propriétaire, on a hâte d’être à cette étape là quand on a pris la décision mais des fois il faut être plus patient et cela paie à long terme.
Claudia : Je trouve cela fun que vous ayez mentionné le budget et l’hypothèque parce qu’il y a plusieurs personnes, justement dû au taux d’hypothèque, qui sont un peu plus faibles présentement, qui sont moins élevés, qui vont se dire : « j’ai trouvé la maison de mes rêves, elle est un peu plus chère que ce que j’avais planifié de dépenser mais vu le taux d’hypothèque un peu plus bas, je vais sortir un peu plus d’argent puis si jamais, dans cinq ans, j’ai de la difficulté à payer, je vendrai à ce moment-là ». Est-ce que c’est quelque chose que vous conseillez pour rentrer dans le marché présentement ?
Valérie : C’est sûr que les taux d’intérêt qui sont bas donnent un avantage. Les gouvernements ont mis certaines procédures pour freiner un peu cette envie des ménages d’excéder leur capacité d’emprunt en mettant, même si les taux sont bas à 2 pour cent pour 5 ans, il faut quand même se qualifier à un taux qui est plus haut. Donc ça freine un peu l’ardeur de certains acheteurs qui auraient tendance à vouloir faire cela. On l’a vécu dans la dernière année, notre maison, notre toit en fait, c’était tout ce que l’on avait. On ne pouvait rien faire d’autre. Mais maintenant qu’on peut recommencer à vivre un peu plus : on veut voyager, on veut faire des activités avec les enfants, aller au restaurant. Si l’on va au-delà de notre capacité financière, on va peut-être trouver ça long, de rester enfermé entre nos quatre murs et ce ne sera plus agréable comme expérience.
Claudia : Il y a plusieurs avantages à être propriétaire, tant sur le plan financier que sur le plan émotif. J’aimerais tout d’abord vous entendre sur les avantages financiers de devenir propriétaire.
Valérie : Le premier avantage, on se paie notre loyer à nous-même. Oui il y en a une partie qui va en intérêts à la banque, mais en ce moment, quand on regarde les paiements hypothécaires, il y en a beaucoup plus qui revient en capital donc on capitalise sur notre propriété. Il y a une augmentation de la valeur, donc la propriété augmente, on paie chaque année, donc notre dette diminue. On peut se servir de la propriété en tant que levier financier pour diversifier, pour s’acheter un chalet, un immeuble à revenu. C’est cette capacité financière-là qui est vraiment intéressante. Je regarde mes parents qui ont acheté une maison dans les années 70 à 30 000 dollars, maintenant elle vaut près de 350 000 dollars. Elle est payée, ils sont là. Cela fait en sorte qu’ils ont un toit sur la tête, ils sont propriétaires et ils ont très peu de frais mensuels.
Claudia : Malgré le fait que les maisons sont beaucoup plus chères, vous voyez toujours cela comme un avantage financier ? Vous mentionnez vos parents, leur maison est payée. Est-ce que c’est toujours possible de croire, par exemple, qu’en 2020-2021, notre génération on va être capable de s’acheter une maison et de finir de la payer au même titre que nos parents l’ont fait ? Si rapidement, et de prendre avantage de ce capital là à long terme ?
Valérie : Évidemment, les taux d’intérêt sont beaucoup plus bas. Quand on fait des comparaisons avec les gens qui ont acheté dans les années 70-80 ou 90, on avait des taux d'intérêt jusqu’à 20 pour cent. Les gens étaient quand même capables de payer. Là les taux d’intérêt sont plus bas, ce qui fait en sorte qu’ils sont capables de s’offrir des propriétés avec des coûts un peu plus hauts. Tout augmente et à chaque fois que le marché augmente, la réaction est là même. « On ne serait pas capable de se racheter la même maison ». Et pourtant, évidemment, en étant propriétaire d’une propriété quand la maison augmente, notre capacité financière aussi augmente. En ce moment, ce qui est difficile c’est pour les premiers acheteurs qui ont une mise de fonds qui ont ramassé leurs sous qu’ils ont mis de côté. La mise de fonds n’augmente pas aussi vite que le marché, tandis que si on est propriétaire, à ce moment-là, s’il y a une augmentation de 10 pour cent, ma capacité financière augmente au même moment parce que la maison que je vais vendre va augmenter de 10 pour cent. Je vais pouvoir prendre cette augmentation là et la mettre dans l’achat d’une propriété qui a augmenté également.
Claudia : Et j’imagine que pour ceux qui sont déjà propriétaires, avec le marché que l’on voit aujourd’hui, ils ont le goût, parfois, de vendre. Pour capitaliser sur ce marché-là. Et aller louer par exemple, pendant quelque temps, pour ensuite acheter leur maison de rêve dans le marché. Est-ce que c’est quelque chose que vous conseillez de faire ?
Valérie : Non je ne le conseillerais pas. Si on vend, oui on bénéficie d’une belle plus-value, on met l’argent à la banque, l’argent à la banque ne rapporte pas autant que l’augmentation des prix de maison en ce moment. Si on prend une pause sur le marché, il y a une possibilité que notre capacité d’acheter diminue plutôt que d’augmenter en restant propriétaire. L’année dernière, quand les prix ont commencé à augmenter au printemps, à l’été, il y en a qui disaient : « on va attendre l’année prochaine parce que là c’est trop fou et puis on va attendre, on ne va pas s’embarquer là-dedans ». Et finalement les prix ont continué à augmenter et ils se sont dit : « oh mon dieu ce que je voulais m’acheter l’année dernière, maintenant je ne peux plus me le permettre ». Donc de sortir du marché en se disant qu’il va baisser, non, je ne le conseillerais pas.
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Et outre les avantages financiers d’être propriétaire, comment est-ce que posséder une demeure peut venir enrichir la vie des gens, d’après vous ?
Valérie : À différents niveaux, en fait c’est une stabilité. Quand on est, exemple, locataire, on ne sait jamais quelle augmentation de loyer on va recevoir, même s’il y a des règles qui entourent... Est-ce que le propriétaire va vouloir reprendre le logement ? Je ne peux pas faire ce que je veux, je ne peux pas rénover ma cuisine et tout cela. En étant propriétaire, on a une stabilité, on a plus de flexibilité et de liberté aussi. On peut faire ce que l’on veut, on est vraiment chez soi. Et en plus, c’est le sentiment d’appartenance, d’appartenir à un quartier, à une ville. On va encourager les petits commerçants qui vont être dans le secteur, on va aller au marché qui a été créé par la municipalité. On a vraiment ce sentiment d’appartenance là. Les soupers entre voisins et l’entraide qui sont encore plus forts quand on est vraiment propriétaire et que l’on veut entretenir et avoir un beau milieu de vie.
Claudia : Oui.
Valérie : Un autre avantage non financier d’être propriétaire c’est justement quand on arrive à un certain âge où la maison est payée, beaucoup de gens pensent parfois à partir en maison de retraite… Ils vont rester dans leur maison, engager des gens pour entretenir l’extérieur et avoir une meilleure qualité de vie, un meilleur milieu de vie, parce que c’est plus économique pour eux, et ils sont chez eux. C’est vraiment, au niveau social, un très bel avantage.
Claudia : Vous nous avez vraiment donné le goût de devenir propriétaire, Valérie, avec tous les avantages. Mais ce n’est pas la seule option et parfois ce n’est pas nécessairement possible pour tout le monde de devenir propriétaire. Mais on retrouve la problématique de l’offre et de la demande dans la propriété. Pas seulement en achetant mais également dans les propriétés locatives. Comment est-ce que l’on peut mieux répondre aux besoins en matière de logement au Canada présentement ?
Valérie : Il y a un problème d’inventaire à travers le Canada. Il y a des répercussions également au niveau locatif. Comme je le disais, il y a des gens qui ne sont pas rendus à acheter, à devenir propriétaires, mais il faut un toit. L’important c’est d’avoir un toit. On parle d’étudiants, des fois des gens qui se séparent. Il faut un entre deux, il faut laisser la poussière retomber. Ça peut être une perte d’emploi et c’est correct d’être locataire, l’important c’est d’avoir un toit sur la tête. Mais il y a aussi des pénuries dans le locatif. Donc c’est sûr qu’il faut augmenter l’offre des logements. Il faut augmenter le nombre de logements disponibles et peut être qu’avec le télétravail, les espaces commerciaux qui se libèrent dans les centres-villes ou dans certaines villes aussi ; peut-être de changer les zonages, de reconvertir pour augmenter le nombre de logements, de faire des logements sociaux aussi, pour pouvoir augmenter le nombre de personnes qui peuvent accéder à avoir un toit.
Claudia : Justement pour faciliter l’accès à la propriété le gouvernement a mis en place plusieurs programmes pour répondre aux besoins en matière de logements au Canada, le RAP en est un bon exemple et on en reparlera un peu plus tard, mais quelle autre forme de soutien fédéral est-ce qu’on retrouve à travers le Canada, justement pour accroître l’accession à la propriété ?
Valérie : Il y a quand même plusieurs programmes : on a le RAP, on parle de la SCHL aussi qui permet de donner une plus petite mise de fonds, qui permet à des acheteurs d’accéder plus rapidement à la propriété en ayant moins de sous à accumuler pour acheter. On a un crédit d’impôt aussi pour les premiers acheteurs aussi pour les frais de démarrage, ça aide beaucoup. Plus localement, par exemple au Québec, on a dans certaines municipalités : Montréal a déjà fait un programme de crédit-taxe ou de subventions pour attirer les familles, car il y a un exil plus en banlieue. Il y a certaines municipalités plus en région qui voulaient attirer des travailleurs ou des gens qualifiés pour repeupler les régions, qui offraient justement des crédit-taxe ou des crédits au niveau de la taxe de bienvenue. Ce sont tous des moyens, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau provincial ou même municipal, qui incitent et qui aident certaines familles à accéder à des propriétés. Vancouver et Toronto ont eu des problèmes d’inventaire depuis des années, ce n’est pas juste la pandémie. Avec la pandémie, ça a touché toutes les provinces du Canada où il y a eu un manque d’inventaire et une poussée des prix et un marché très favorable aux vendeurs. Il faut trouver une solution à l’inventaire, il faut trouver une solution à l’offre. En ce moment il y a beaucoup d’exil : beaucoup d’entreprises qui voient une opportunité de baisser leurs coûts fixes en baissant le pied carré parce que le télétravail fonctionne ou au moins, une portion hybride fonctionne bien. Donc on a des centres-villes, des tours à bureaux qui vont commencer à se vider, donc si les municipalités, les gouvernements se mettent ensemble pour changer les zonages, permettre de nouvelles constructions dans des endroits stratégiques ou de modifier des tours qui sont en commercial, de faire des modèles hybrides résidentiel/commercial, ça va augmenter l’offre et être une des solutions en sortant de pandémie. Cela va aider autant le milieu des affaires qui veulent réduire, autant les propriétaires de bâtiments commerciaux et les familles qui vont pouvoir avoir plus d'offres.
Claudia : Okay. On va parler un peu du RAP parce que tout le monde connait le nom, mais tout le monde ne sait pas comment ça fonctionne. Moi j’ai « rapé », ça nous a aidé dans le processus lorsque l’on a acheté notre première maison : comment ça fonctionne ? Parce que c’est quand même une façon d’acheter une maison, d’acquérir une maison qui est très intéressante.
Valérie : Oui, c’est une façon de s’emprunter de l’argent à nous-même, un fonds de pension que l’on s’est créé sans avoir d’impact fiscal, et d’avoir quinze ans pour le rembourser. Ça permet, justement de se servir de nos économies, de sortir nos économies jusqu’à 35 000 dollars par personne, ça a été augmenté de 25 000 à 35 000 dernièrement. C’est vraiment un programme très intéressant et ce qui a changé en 2020 c’est qu’avant, on pouvait « raper » une fois, maintenant on peut « raper » plus d’une fois dans une vie. Parce que l’on sait très bien que malheureusement, la vie étant ce qu’elle est maintenant, il y a des séparations, des choses qui peuvent arriver, cela permet à un couple qui se sépare de pouvoir « raper », même s’ils ont déjà « rapé » pour acheter la propriété qu’ils ont en ce moment, de « raper » pour racheter la part du conjoint ou même de pouvoir racheter autre chose. Cela va permettre à une famille qui se sépare de rester propriétaire plutôt que de s’en aller en location.
Claudia : Et comment est-ce que le gouvernement peut collaborer avec le secteur privé pour faciliter l’accès à la propriété à travers le Canada ?
Valérie : En fait, le secteur privé ; les gouvernements fédéraux, provinciaux essaient d’attirer des entreprises dans leurs communautés pour créer de l’emploi, créer de la richesse, etc. Si l’on combine avec un secteur privé, de dire : « viens t’établir ici et on va faire des politiques pour des travailleurs, pour qu’ils viennent s’établir. On va amener des travailleurs qualifiés, cela va permettre à certains ménages de déménager dans des endroits où ils n’auraient pas pensé pouvoir acheter des propriétés peut être qui offrent plus parce qu’ils ne sont pas dans des grands centres et cela aiderait autant l’économie régionale que l’entreprise qui se dira « si j’installe mon usine à tel endroit, ils vont m’aider à avoir de la main d’œuvre qualifiée » et c’est un enjeu en ce moment. Moi je pense que ça pourrait être un beau programme qui pourrait s’appliquer à travers le Canada, qui pourrait aider toutes les communautés.
Claudia : Et est-ce que vous croyez qu’il y aurait également des collaborations possibles avec des organismes à but non lucratif, justement pour aider la population canadienne à avoir un toit au-dessus de sa tête ?
Valérie : Oui, en fait je peux faire le parallèle avec l’Europe. En France, si on bâtit des tours à condo, un promoteur doit aussi s’engager à faire des logements sociaux, des logements à coûts moindres. Donc ça fait en sorte que l’on densifie certains endroits et cela force les entrepreneurs à avoir un certain engagement. Donc oui, en étant associé avec des organismes à but non lucratif qui ont pour but de loger des familles, on augmente l’offre, autant dans ce qui est à vendre que ce qui est à louer.
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Vous parliez de famille, ce que je vois beaucoup dans mon entourage récemment c’est l’acquisition d’un patrimoine familial, c’est-à-dire que les grands parents vont acheter avec leurs enfants, voire les petits enfants, et tout le monde va déménager dans une bi-génération. Je trouve que c’est une façon géniale de mettre ensemble tous nos avoirs et d’acquérir une propriété, surtout dans le marché que l’on connaît aujourd’hui. Est-ce que c’est quelque chose que vous voyez de plus en plus vous aussi en tant que courtier immobilier ?
Valérie : Oui, on voit l’engouement pour les inter-générations vraiment augmenter avec la pandémie, les gens ont voulu se rapprocher beaucoup, prendre soin de leurs parents et à l’inverse les parents veulent prendre soin aussi des petits enfants. Le fait de vivre sous le même toit c’est une très grande richesse, d’aller cogner et voir mamie qui est de l’autre côté de la porte. Cela apporte une sécurité. Il y a beaucoup de personnes à la retraite qui veulent passer l’hiver en Floride et qui ne veulent plus avoir leur maison parce que c’est le stress de ce qui peut arriver. Là, il y a toujours quelqu’un à la maison avec les enfants qui sont là. Cela permet aussi aux enfants qui démarrent dans la vie, qui ont moins de mise de fond de pouvoir s’offrir ces propriétés-là, parce que les parents, souvent, ont une plus grande capacité financière. Cela permet aussi, je parlais à quelqu’un dernièrement, qui a pu garder son condo en ville, le louer et s’acheter une propriété avec ses parents ; qui a pu conserver un actif pour augmenter son capital. Il y a beaucoup d'avantages aux bi-générations. C’est une richesse sociale immense et en même temps économiquement c’est idéal pour tout le monde, tout le monde y gagne.
Claudia : Je suis curieuse de savoir si vous voyez aussi un phénomène au niveau des générations un peu plus jeunes, les milléniaux et même un peu plus jeunes qui déménagent avec des amis ?
Valérie : Je l’ai déjà vécu même avec des clients justement, deux amis ensemble qui ont acheté une propriété et je pense cinq ans plus tard, un des deux a racheté parce qu’ils étaient rendus ailleurs dans la vie ; un des deux a gardé la propriété, ça a fait une belle équité à celui qui a racheté et le second a pu garder la propriété. On le voit aussi dans l’immeuble à revenu, il vont s’acheter des duplex ou des triplex : cela permet d’avoir un quatre et demi et chacun a son quatre et demi et ça continue d’augmenter, ils se paient des loyers à eux au lieu de payer à un propriétaire.
Claudia : J’ai comme l’impression que le rôle du courtier ou de l’agent immobilier a vraiment évolué à travers le temps. Par le passé, on faisait affaire avec un agent immobilier lorsque l’on voulait vendre la maison surtout. Mais là j’ai comme l’impression qu’il y a également des bassins d’acheteurs qui font appel à des agents immobiliers pour avoir le service de se dire : « si tu trouves un maison qui est à mon goût j’aimerais le savoir aussi ». Donc votre rôle a évolué : vous êtes plus des médiateurs que des vendeurs j’ai l’impression.
Valérie : Oui tout à fait. Le rôle de conseil a vraiment pris beaucoup plus de place dans le milieu auprès des courtiers qui sont sur le terrain. Les transactions sont de plus en plus complexes. Il y a de plus en plus de choses à vérifier et avec le manque d’inventaire en ce moment, souvent on va aller débusquer des propriétés qui ne sont pas sur le marché pour les acheteurs. Les acheteurs sont en confiance d’avoir quelqu’un dans leur coin qui se bat pour eux, pour obtenir la propriété. C’est sûr et certain, on fait des mariages, entre deux familles, c’est toujours ce que je dis !
Claudia : Et d’après vous, que fait le secteur immobilier incluant l’ACI pour faire bouger les choses au niveau du fédéral, ce qui permet d'accroître à l’accession à la propriété au pays ?
Valérie : Justement, l’ACI fait des représentations chaque année auprès du gouvernement fédéral, une fois par année, on appelle cela les Journées du CAP et il y a des courtiers et des représentants d’associations qui se déplacement à Ottawa et qui vont rencontrer les députés pour les informer, les faire bouger, leur donner des informations sur le marché immobilier, des statistiques et tout cela. Donc on est des centaines à être à Ottawa sur la colline et ils savent, quand on se promène au Parlement on voit les députés avec les cahiers d’informations qui ont été remis. Et après cela, en caucus, le message est fort. Après cela, avec les associations locales, provinciales, eux aussi continuent à longueur d’année d’influencer et de parler et d’informer des députés, les élus autant municipaux, provinciaux que fédéraux, des enjeux de la propriété. Grâce à cela, le RAP on en parlait ; il y a eu des changements au niveau du RAP, cela faisait partie des demandes et du lobbying que l’ACI a fait. Il y a eu un impact, cela a changé.
Claudia : Qu’est-ce que peuvent faire les courtiers et agents immobiliers à titre personnel pour contribuer à accroître l’accès à la propriété ?
Valérie : Première chose, évidemment, ils peuvent s’impliquer auprès de leur association provinciale ou canadienne pour faire partie des gens qui vont rencontrer les députés et tout cela. Cela peut être une belle façon de s’impliquer. Mais dans le marché actuel, on parlait en représentant des acheteurs, que l’on essaie de débusquer des propriétés qui ne sont pas sur le marché. On va prendre des rues entières, des quartiers, appeler les vendeurs, les informer aussi parce qu’en ce moment on entend beaucoup de choses dans les nouvelles mais parfois les gens n’y croient pas. Si on leur dit : « saviez-vous que votre maison vaut tant maintenant ? Savez-vous que le marché est ce qu’il est ? ». On sert vraiment à informer, on va cogner aux portes, on appelle les gens pour essayer de trouver de l’inventaire pour les acheteurs qui cherchent à loger leur famille. Mais en même temps on informe les vendeurs du marché et de ce que leur maison peut valoir. Beaucoup parfois disent : « je vais en profiter et je vais passer à mon autre projet, je vais aller habiter à mon chalet, faire autre chose et profiter de ce marché-là ». Cela fait en sorte que petit à petit, on augmente l’inventaire tranquillement de cette façon-là aussi.
Claudia : Donc comment est-ce que vous voyez l’avenir de la propriété en cette période de sortie de pandémie ? Quelles sont vos espoirs pour 2021-2022 ?
Valérie : J’espère vraiment que l’on va retourner un petit peu à un marché plus équilibré. Pas un tout pour le tout où l’inventaire augmente à cent pour cent et cela devient un marché favorable aux acheteurs mais au moins un marché plus équilibré où les acheteurs ont plus de choix, de temps, où ils se battent moins pour avoir la propriété. Un marché quand même favorable aux vendeurs, mais équilibré. C’est ce que je nous souhaite pour la fin de 2021, peut-être 2022.
Claudia : Merci beaucoup Valérie pour toutes ces informations pertinentes sur le sujet de l’accès à la propriété au Canada. De mon côté, j’ai appris énormément de choses. Il y a vraiment beaucoup d’informations à assimiler alors je vous invite à réécouter l’épisode ou encore les épisodes passés sur CREA.ca/balado. Je vous remercie énormément d’avoir été à l’écoute de EN DIRECT. Si vous avez aimé l’émission je vous invite à nous donner cinq étoiles et à vous abonner également à nos chaines Spotify, Apple et Stitcher et je vous dis à la prochaine pour une autre émission, et à très bientôt !