Travailler en immobilier dans une petite collectivité insulaire canadienne

Les courtiers et agents immobiliers qui travaillent dans les petites collectivités insulaires savent que la clé du succès consiste à se positionner en tant qu’experts locaux et que la réputation est primordiale dans une population où le mot se répand rapidement.
Les marchés insulaires n’ont pas tendance à être des environnements au rythme rapide dans lesquels les transactions sont conclues en quelques jours avec des offres multiples. La conclusion d’une transaction prend des semaines, et la patience est essentielle.
Ce qui différencie la vie, et la vente, dans les îles?
Sur le continent, si une propriété « n’est pas vendue en deux semaines, le bouton de panique se déclenche et on commence à baisser le prix », explique Myles Wilson, agent immobilier chez Pemberton Holmes à l’île Salt Spring en Colombie-Britannique, l’une des îles Gulf dans le détroit de Georgia, qui compte une population de plus de 11 600 habitants.

« Nous avons 33 agents immobiliers et, si l’acheteur vient de l’extérieur de l’île, il ne peut pas simplement sauter dans sa voiture et se rendre à l’inscription. I doit prendre un traversier et trouver un hébergement. Trouver un acheteur pour une propriété est davantage un processus. En moyenne, la vente d’une propriété peut prendre jusqu’à six mois. »
L’immobilier insulaire possède son propre ensemble de réalités et de défis uniques que les courtiers et agents immobiliers qui vivent sur une île sont les mieux placés pour comprendre.
« Si vous vivez sur une île, que vous travaillez en immobilier et que vous ne possédez pas au moins trois bateaux, vous n’êtes pas un courtier ou agent insulaire, plaisante Steve Rolston, courtier responsable de J.A. Rolston Ltd. Brokerage sur l’île Manitoulin, en Ontario. Il n’y a qu’un seul lampadaire sur l’île et il se trouve au niveau du pont tournant lorsque vous quittez l’île. C’est un monde différent ici. »
« Si vous vivez sur une île, que vous travaillez en immobilier et que vous ne possédez pas au moins trois bateaux, vous n’êtes pas un courtier ou agent insulaire. »
Steve Rolston
Pour les habitants d’une île, le « compromis » pour vivre à distance dans des endroits pittoresques sera naturellement un accès aux commodités normales pour les gens de la ville. Pour se rendre chez Canadian Tire ou Home Depot, il faut généralement prévoir une journée pour prendre un traversier. Ceux qui souhaitent acheter dans des endroits tels que l’île Salt Spring doivent être préparés à de tels défis et à un mode de vie plus lent. Travailler avec un courtier ou agent immobilier qui maîtrise la liste complète des avantages et des inconvénients, et qui peut fixer des attentes réalistes, peut faciliter le processus.
« Je ne vendrais certainement rien à Vancouver, car je ne connais pas ce marché », déclare M. Wilson, qui a quitté l’Ontario pour l’île Salt Spring dans les années 1980 et s’est lancé dans l’immobilier en 1991.
La géographie influe sur le zonage et l’accès aux services publics
Une partie de son travail consiste à comprendre que ces propriétés disposent de puits forés, de champs d’épuration et, dans de nombreux cas, sont situées sur des lieux de sépulture autochtones. Un acheteur a besoin d’un courtier ou agent immobilier local qui sait où chercher des cartes et trouver des réponses à des questions auxquelles un acheteur ne pense peut-être pas. Les lois locales en matière de zonage peuvent également être compliquées et nécessitent une personne qui les comprenne. Et dans le cas de Salt Spring, qui n’est pas une municipalité, la recherche d’informations sur une propriété ne se fait pas à partir d’une source unique. Les informations proviennent d’Islands Trust, du Capital Region District (CRD), de la Heritage Branch du gouvernement de la Colombie-Britannique et d’autres agences, explique Heidi Kuhrt, agente immobilière chez Macdonald Realty Salt Spring Island.
« À l’île Salt Spring, il n’y a pas un seul organisme responsable de l’eau, contrairement à Vancouver où Metro Vancouver supervise les opérations et la distribution, dit-elle. Certains foyers sont alimentés par des puits, d’autres par des sources ou des lacs, et d’autres encore sont raccordés à des systèmes d’approvisionnement en eau communautaires. Les gens disent souvent qu’ils entendent dire que l’eau est rare sur l’île. Ce n’est pas vrai. Il serait plus juste de dire que la situation est compliquée. »

Qu’est-ce qui amène les gens à s’installer dans les collectivités insulaires?
Mme Kuhrt a grandi à Vancouver, où elle a étudié et travaillé comme professionnelle de l’immobilier. Elle a ensuite travaillé pendant dix ans à l’île Bowen, en Colombie-Britannique, avant de s’installer avec sa famille à l’île Salt Spring. Elle avait une jeune famille et voulait des services tels qu’un hôpital, une piscine intérieure et une école secondaire, qui n’existent pas dans les autres îles Gulf. Elle précise que 95 % de son activité sur l’île consiste à vendre des résidences principales et non des résidences secondaires.
« L’île attire de nombreux penseurs créatifs et hors des sentiers battus, explique-t-elle. Je suis l’un des premiers points de contact pour eux. C’est amusant de rencontrer de telles personnes.De nombreuses parties de l’île sont des joyaux cachés que vous ne pourrez découvrir que lors d’une recherche de propriété personnelle, y compris des maisons fascinantes sur le plan architectural et de magnifiques endroits naturels secrets. »
D’après l’expérience de M. Wilson, le profil type de l’acheteur à l’île Salt Spring est celui d’une personne âgée de plus de 55 ans, dont 85 % achètent une propriété pour y vivre à plein temps et les 15 % restants pour l’utiliser occasionnellement.
Sur l’île Manitoulin, en Ontario, qui s’étend sur 160 kilomètres et qui est la plus grande île lacustre d’eau douce au monde, il y a plusieurs types d’acheteurs, explique M. Rolston. Il s’agit notamment d’anciens habitants de l’île (appelés haweaters sur l’île, un nom qui dérive de la prédominance de l’aubépine) qui reviennent s’installer sur l’île. Ensuite, il y a les acheteurs urbains, qui prennent leur retraite et ont tendance à graviter vers la moitié est de l’île Manitoulin, où les magasins et les services sont plus facilement disponibles, et où l’accès au continent est plus facile.
M. Rolston indique que ses activités se répartissent entre 60 % de ventes résidentielles et 40 % de ventes récréatives. Il a vécu la majeure partie de sa vie sur l’île Manitoulin et travaille dans l’immobilier depuis 38 ans. « Personnellement, je n’envisagerais jamais de travailler dans une région que je ne connais pas bien. »
Connaître la région dans laquelle elle travaille est la pierre angulaire de l’activité de Tina Lynch à l’île Gabriola, au nord de l’île Salt Spring, en Colombie-Britannique. L’agente immobilière de Royal LePage Nanaimo Realty y a déménagé avec sa famille alors qu’elle n’avait que quatre ans et travaille dans l’immobilier depuis 20 ans. Au service d’une population d’un peu moins de 5 000 habitants, son agence immobilière réalise en moyenne 70 transactions par an, dont un grand nombre pour des personnes qui ont pris une retraite anticipée et se sont installées sur l’île pour faire du bénévolat et lancer des initiatives communautaires, telles qu’une clinique de soins de santé.
Vendre dans un endroit où tout le monde se connaît
Dans un marché aussi petit, la réputation est primordiale, dit-elle.
« Nous connaissons beaucoup de gens dans la collectivité, dit Mme Lynch. Si j’ai besoin de parler à quelqu’un, et parler aux gens est important en immobilier, je peux aller à l’épicerie et probablement entrer en contact avec trois ou quatre personnes. C’est donc différent de travailler en ville. Cela signifie également que vous devez faire très attention à la manière dont vous vous comportez en tant qu’entrepreneur, car il s’agit d’une petite collectivité et si vous commettez une erreur, tout le monde le saura ».
L’avantage, selon elle, c’est que l’image de marque et le marketing sont plus faciles à mettre en place. Mme Lynch et son mari, qui est son associé, conduisent une camionnette Volkswagen de 1978 qu’ils utilisent dans le cadre de leur stratégie de marque.
« Vous vendez un style de vie. C’est ce qui attire les gens, c’est pourquoi ils viennent ici. Ils veulent du changement. Ils veulent un mode de vie décontracté et simple. »
Mike Turner est bien d’accord – les gens qui se présentent à son agence immobilière (Royal LePage Turner Realty), située à Gander, à Terre-Neuve-et-Labrador, cherchent à s’évader de la vie urbaine. M. Turner vient de vendre une maison de deux chambres et deux salles de bain, construite en 1909 pour servir d’église, à l’extrémité nord de la province, dans un endroit appelé Pike’s Arm, situé sur l’île New World (population d’un peu moins de 3 000 habitants). Le nouveau propriétaire pourra s’asseoir dans le salon, boire un café et observer les baleines et les icebergs.
M. Turner vend des propriétés sur une chaîne d’îles dans la région, qu’il décrit comme un lieu où le rythme est plus lent.
« Les prix sont beaucoup plus bas et il n’y a donc pas de guerre d’enchères. C’est une façon totalement différente de vendre de l’immobilier. C’est beaucoup plus décontracté, avec beaucoup plus de déplacements, comparé aux marchés hyper compétitifs des métropoles. Et il faut être patient – il faut beaucoup plus de temps pour vendre une propriété, en attendant que la bonne personne se présente. C’est donc vous qui définissez les attentes de vos clients et les vôtres. »
